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Page:Pradez - Les Ignorés.djvu/130

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les ignorés

des vitres, luire le clair-obscur du dehors. Malgré ses efforts pour conserver la pleine possession de son inquiétude, celle-ci, par moment, lui échappait. Une invincible fatigue l’engourdissait, et peu à peu ses paupières sèches s’appesantirent…

Lorsque Jérôme rentra avant l’aurore, il trouva la maison obscure et muette. Catherine, ses cheveux frisés en désordre autour de la tête, dormait d’un si lourd sommeil qu’elle n’entendit rien. Même sous le rayon de la lampe, elle ne s’éveilla pas. Son visage, encadré de sa toison claire et crépue, avait une pâleur inaccoutumée, un air d’excessive fatigue, et Jérôme, après avoir espéré un moment la voir ouvrir les yeux, se décida à la laisser dormir. Bien que, pour éviter l’amas de la neige, il eût marché tout le temps le long de la voie, il était très en retard et, lui aussi, sentait un pressant besoin de repos. L’atmosphère tiède de la chambre l’enveloppait de bien-être. Une joie de vivre, instinctive et puissante, circulait dans ses veines. Il regretta un moment de ne pas pouvoir, comme il l’aurait voulu, questionner Catherine sur les traces de pas qu’il avait vues dans la neige autour de la maison, mais il ne s’attarda pas à s’en tourmenter. Il se dit tranquillement :

— Qui serait bien venu par un temps pareil ? C’est quelque bête.

Dix minutes plus tard, il dormait d’un sommeil sain, sans rêve, tandis qu’au dehors la longue nuit d’hiver s’achevait sous le fourmillement des étoiles. Il y en