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lentin étaient enfin débrouillées. D’une fortune jadis solide, il ne restait qu’une épave insuffisante à conduire jusqu’à sa première messe, les études du jeune garçon. Après beaucoup de tiraillements de part et d’autre, on se cotisa pour parfaire la somme nécessaire et indemniser aussi Suzanne des frais d’entretien que lui occasionnait la présence de Michel pendant les temps de vacances. Il ne vint à l’idée de personne de la débarrasser de ce souci qui, au fond, ne la regardait pas. C’était elle que Valentin, de préférence à tout autre, avait appelée à son lit de mort. On prit cet acte du moribond comme une indication de sa volonté. Suzanne resta chargée de l’enfant.

Le troisième trimestre venait d’échoir lorsque, du séminaire, arriva à l’adresse de Suzanne Roy, un large pli jaune, pesant. Bien qu’elle s’intéressât déjà à l'enfant que la destinée lui avait jeté dans les bras, ce qu’il y avait d’amer dans sa mémoire au sujet de Valentin la troublait encore un peu lorsqu’elle s’occupait de Michel. Sachant le jeune garçon sans goût pour la vocation qui lui avait été imposée, elle se sentit sûre, en brisant le large cachet rouge, de trouver, sous cette enveloppe gigantesque, quelques plaintes au sujet du séminariste. Mais pourquoi lui adressait-on ce pli à elle et non aux véritables parents du jeune homme ?

Elle fut vite détrompée, l’enveloppe contenait des comptes, très précis, de pension, d’instruction et de menus frais d’écolage. Embarrassée de cet envoi qui ne la concernait pas, elle l’expédia, après quelques ré-