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permettre de vous parler du passé ? Il y a si longtemps que tout cela m’étouffe. Cela me ferait du bien d’en parler une fois librement avec vous. Pourquoi ne voulez-vous pas ?

— Il me semblait que moins nous remuerions les réminiscences inutiles, mieux cela vaudrait pour vous. Je voulais vous aider à les oublier, voilà tout. Puisque c’est impossible, dites-moi, sans réticence, tout ce qui vous a tourmentée autrefois et tout ce qui vous tourmente encore aujourd’hui. Moi, refuser de vous écouter ! Comment avez-vous pu le croire, Isabelle ?

Elle répondit avec une animation subite :

— Si vous saviez avec quelle netteté je me souviens de ce temps-là ! Les heures se sont gravées dans ma mémoire comme dans du granit, les moindres détails, les faits les plus insignifiants, tout. Vous n’avez pas vu les choses d’aussi près que moi ; mille circonstances vous auront échappé ; vous n’avez pas assisté, jour après jour, à la suite des événements. Je vous raconterai tout depuis le commencement. Ah ! comme cela me fera du bien ! C’est une longue, longue histoire.

Offrant au regard de Jacques la rondeur de sa joue mate, aux dessous anémiés, et l’épaisse