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— Eh bien, fillette ? Mais sa voix me sembla avoir un timbre nouveau, étrange. Cette altération me saisit. Je le regardai, surprise, et sa figure aussi me parut différente de celle de tous les jours. Un instant j’hésitai, puis, brusquement, je me cramponnai à son cou et j’éclatai :

— Pourquoi est-ce que Lucien est parti ?

Il me caressait la figure des deux mains, sans répondre. Il n’avait pas pris cette fois son air fâché, mais il ne disait rien. Je répétai frémissante :

— Pourquoi est-ce qu’il est parti ? Pourquoi ?

Il répondit enfin :

— Voyons, Isabelle, mon enfant, il faut être raisonnable. Lucien était en âge de se choisir une destinée. C’est le sort des garçons de s’en aller. Toi-même tu n’es presque plus une enfant.

Je protestai énergiquement :

— Mais il n’avait pas envie de s’en aller, je le sais, moi.

Il cessa brusquement de me caresser et demanda :

— C’est lui qui te l’a dit ?

— Non.