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elle avait trouvé vis-à-vis d’elle le petit garçon rachitique, maigrelet et souffreteux. Jour après jour, il avait fallu l’entourer de soins, le disputer aux mille misères des enfances chétives, deux fois l’arracher à la mort. Tout de suite la sollicitude et l’attention du père étaient allées à l’enfant. Germaine n’avait pas pu se faire une heure d’illusion sur le but de sa présence dans la maison. Elle avait été élue pour servir de mère au fils d’une autre femme ! Mais elle avait un foyer, elle était à l’abri de tout souci matériel et, dès que Lucien était pourvu de ce qui lui était nécessaire, elle restait libre d’employer ses heures comme elle l’entendait. Elle avait accepté sans protester l’ouverte préférence de son mari pour l’enfant et, pliant sa vie aux circonstances, avait, sans en souffrir, occupé la seconde place dans les affections du père et du fils. Elle s’était assujettie vis-à-vis du petit garçon à une exagération de devoirs extérieurs, cherchant à masquer ainsi l’indifférence absolue qu’il lui inspirait. Et, jusqu’à la nuit où, succombant au mal qui le minait depuis des années, le père, plein d’angoisse, lui avait fait jurer de garder l’enfant auprès d’elle, elle avait cru que sa complète insensibilité vis-à-vis de Lucien n’était per-