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un vaste domaine. Depuis ce moment, Lucien avait subi l’autorité froide de M. du Plex comme il acceptait les soins assidus de sa belle-mère, passivement, sans qu’il fût possible de discerner si quelque chose protestait en lui ou s’il se pliait sans effort à un sort inévitable. Et à mesure que les mois passaient, Philippe, au lieu de s’habituer à la vue de l’enfant étranger qu’il avait accueilli sans protestation, semblait s’en irriter davantage. Pourquoi ? Germaine se le demandait pour la centième fois, tandis que ses yeux inquiets erraient à l’aventure sur le paysage sans limite où s’étalait la chaude couleur des moissons.

La plainte définie que Philippe avait formulée ce jour-là au sujet du jeune garçon l’obsédait comme un commencement d’hostilité, une première escarmouche sur un terrain encore mal connu. Malgré l’ennui que lui causait cette démarche, Germaine se décida à parler à Lucien dès son retour du collège. Elle lui rappellerait simplement par quelle suite de circonstances fortuites il se trouvait dans la maison ; elle lui ferait comprendre les devoirs de sa position délicate vis-à-vis d’Isabelle. Il n’était plus un enfant. Trop souvent à cause de sa taille, si petite, elle oubliait son âge.