Page:Pradez - Réparation, 1905.djvu/241

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 241 —

faire. Si tu ne le comprenais pas aujourd’hui, il me semble que notre amitié, basée sur une erreur, s’en irait avec tout le reste. Tout ce que tu as fait autrefois pour moi deviendrait une dette pesante, et le déchirement d’aujourd’hui une plaie empoisonnée que les années, en passant, élargiraient.

L’amertume qui bouillonnait au fond de son cœur montait à ses lèvres en vagues tumultueuses, mais, refoulant le flot prêt à déborder, il se tut brusquement.

Un silence régna.

— Je ne comprends pas bien ce que tu attends de moi, reprit enfin Philippe avec effort ; qu’est-ce que tu veux, voyons ? Que j’aime Germaine comme elle l’exigerait si je me rapprochais d’elle ? Est-ce cela ? Eh bien, non, je ne puis pas.

Il continua précipitamment :

— J’ai vieilli, moi, tandis qu’elle est restée obstinément la même ; les jours s’entassent sur sa tête sans la changer. Rien ne l’instruira jamais. Mais aucune des joies qu’elle convoite, aucune, n’est plus à la portée de ma main pour la prendre et la lui offrir, entends-tu ? C’est un monde fermé devant nous ; rien ne le rouvrira jamais. Il m’est aussi impossible