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Ne recevant aucune réponse, il devina le désir ardent de sa mère de lui être secourable à l’heure douloureuse. Il reprit au bout d’un instant :

— Surtout, ne vous inquiétez pas à cause de moi.

Mais comme, anxieuse, elle continuait de garder le silence, il fit un effort pour vaincre tout à fait sa répugnance à parler ouvertement de sa blessure. Il ajouta très bas :

— Mère, ne vous inquiétez pas ainsi, je vous en prie, cela m’ôte le courage.

Et rencontrant enfin le regard douloureux et craintif, tout à coup, dans la forme chétive et vieillotte, il devina, en toute son intensité, l’incorruptible, le puissant, l’impérissable amour maternel. Brusquement son orgueil d’homme céda. Il enveloppa sa mère de ses bras vigoureux et il laissa voir à nu sa plaie :

— Non, mère, murmura-t-il suffoqué, Isabelle ne sera jamais à moi, mais je ne suis pas abandonné. Ne me restez-vous pas, ne serez-vous pas toujours avec moi ?

Cœur contre cœur, ils s’étreignaient tandis que le drame de la vie brisée, l’effroi de l’avenir dépouillé et la certitude d’une inévitable