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Pendant que Joseph chargeait les malles sur la voiture, les adieux s’étaient précipités. Un baiser froid, rapide, avait à peine effleuré sa joue, et l’enfant qu’elle avait reçu en dépôt solennel des mains d’un père mourant avait disparu ! Elle s’était trouvée seule en face du désespoir bruyant d’Isabelle. Cachée on ne savait où pendant toute la matinée, la petite fille, arrivée trop tard pour voir partir Lucien, s’était mise à pleurer en criant des choses absurdes :

— Moi aussi, je m’en irai… Dès que je serai grande… je m’en irai !… Je ne veux pas rester ici… je ne veux pas… je ne veux pas.

Qu’aurait dit Philippe de cette explosion de chagrin ridicule ? Si souvent, en entendant le rire frais de sa fille, en voyant ses yeux luire de plaisir, il avait regretté tout haut le moment de faiblesse qui avait permis aux enfants, pendant la longue convalescence de Lucien devant aboutir à son départ, de se voir librement !

Pour distraire Isabelle, Germaine l’avait emmenée dehors, et, peu à peu, le mouvement et le plein air avaient apaisé l’étrange surexcitation de l’enfant. Elle avait marché d’abord sans rien dire, les cheveux au vent. L’atmo-