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avait hésité, perplexe ; enfin elle avait dit simplement :

— Vous dites des folies, Isabelle. Votre père n’aime pas Lucien autant que vous, qui êtes son propre enfant. C’est tout naturel.

— Mais à qui est-ce qu’il appartient alors, Lucien ? Est-ce à vous, maman ?

— Non, il est orphelin.

Et pour clore par un mot décisif la série de questions inutiles qu’elle sentait venir, elle avait ajouté d’un ton décidé :

— Ne pensez pas à ces choses pour le moment. Vous ne pouvez pas encore les comprendre. Quand vous serez plus âgée, elles vous sembleront très simples.

La fillette avait aussitôt quitté son bras et, le visage tendu, presque contracté, elle était retombée dans le silence. Tous les efforts de Germaine pour l’arracher à son mutisme avaient été vains. Elle avait dû renoncer à la distraire, mais, de toute la journée, elle n’avait pas osé l’abandonner un seul instant.

L’unique manière de lutter avec Isabelle dans le cœur de son père était d’accepter l’enfant de toute son âme, comme elle n’avait jamais pu accepter Lucien. Elle s’y efforçait. Elle ne l’avait quittée qu’au moment où elle