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pressant de se rassurer à fond, de parler à Philippe à cœur ouvert, de renverser toutes les barrières qui le séparaient d’elle, de le reprendre tout entier comme elle l’avait possédé autrefois, venait de la saisir au milieu de son ardente anxiété.

Maintenant que le fait était accompli, l’oubli viendrait. Il viendrait tout naturellement, par la simple force des choses. Oui, peu à peu, perdu dans la foule des incidents de la vie journalière, le départ de Lucien s’enfoncerait avec eux dans l’ombre du passé. Ce qui avait fait grincer si longtemps les rouages de l’existence commune ne serait plus qu’un souvenir lointain, insignifiant, inoffensif.

Elle se hâtait, les mains tremblantes, secouée par une fièvre d’attente anxieuse. Voir Philippe… l’entendre… saisir dans l’expression des traits, dans l’œil noir au regard changeant, dans la voix au timbre si souvent dur, une impulsion à rattacher aux jours passés les jours à venir !… Elle se hâtait, elle se hâtait, de plus en plus possédée par sa vivante passion.

Elle chercha en vain Philippe dans toutes les chambres de la maison ; mais dès qu’elle descendit les marches du perron, elle l’aper-