Page:Premier recueil de diverses poésies tant du feu sieur de Sponde que des sieurs Du Perron, de Bertaud, de Porchères et autres, non encor imprimées, recueillies par Raphaël Du Petit Val, 1604.djvu/17

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XXII.


On dit que dans le ciel, les diverses images
Des astres l'un à l'autre ensemble rapportez
Engendrent ici bas tant de diversitez
Et tantost de profits & tantost de dommages :

Tous leurs estats leur font à leur tour leur homages,
L'un baisse l'autre hausse : & tant de dignitez
Ont en maintes façons certains points limitez
Qui leur font & laisser & perdre leur visages.

Mon amour seur se treuve exempt de ses rigueurs
Si ce n'est pour accroistre encores ses vigueurs,
Mais non pas pour jamais d'un seul moment descendre.

Non pas s'il me falloit descendre dans la mort :
En somme il est, s'il faut par le ciel le comprendre,
Ferme ne plus ne moins que l'estoile du Nort.


XXIII.


Il est vray, mon amour estoit sujet au change,
Avant que j'eusse appris d'aimer solidement,
Mais si je n'eusse veu cest astre consumant
Je n'auray point encore acquis ceste louange.

Ore je vois combien c'est une humeur estrange
De vivre, mais mourir, parmy le changement,
Et que l'amour luy mesme en gronde tellement
Qu'il est certain qu'en fin, quoy qu'il tarde il s'en vange.

Si tu prens un chemin après tant de destours,
Un bord après l'orage, & puis reprens ton cours,
Et l'orage aux destours il survient le naufrage

Un erreur, on dira que tu l'as merité,
Si l'amour n'est point feint il aura le courage
De ne changer non plus que fait la verité.