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Page:Prieur - Notes d'un condamné politique de 1838, 1884.djvu/145

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NOTES D’UN CONDAMNÉ POLITIQUE.

gnalé notre carrière en Canada par le meurtre, le pillage et l’incendie, nous n’étions tous que des coupe-jarrets digne d’un sort cent fois pire que celui qu’on nous faisait ; sympathiser avec nous, c’était sympathiser avec le crime : … en un mot tout ce qu’un pareil journal peut inventer en pareille matière.

Il nous fallut encore supporter cela sans mot dire, et endurer les mille petites misères que de semblables articles, avalés par un public bien disposé à les recevoir, ne manquaient pas de nous attirer.

Le choix des officiers et des gardiens des établissements de déportation, dans les colonies pénales de l’Angleterre, n’est pas toujours des meilleurs, si j’en juge par mon expérience de condamné politique en la Nouvelle-Galles du Sud. Le surintendant de l’établissement de Long-Bottom était un homme grossier et brutal, de mœurs détestables et d’un tempérament presqu’aussi incontrôlable qu’incontrôlé. Nous apprîmes de ses subordonnés, qui le haïssaient pour le moins autant qu’ils le redoutaient, qu’il avait été officier dans l’armée, d’où on l’avait expulsé pour cause de mauvaise conduite.

Cet homme prenait plaisir à tendre des piéges à notre patience, et il avait surtout pris en grippe M. le notaire Huot, à cause, je suppose, de son âge avancé, de son caractère professionnel et de son apparence singulièrement distinguée. Notre surintendant ne manquait jamais l’occasion de tâcher de nous pousser à