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Page:Prieur - Notes d'un condamné politique de 1838, 1884.djvu/148

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notes d’un condamné politique.

Il faut croire que quelques-uns se mirent du côté du chef et que d’autres prirent fait et cause pour le mari insulté ; car il s’ensuivit une mêlée terrible : nous entendions, de nos dortoirs, les cris et le bruit des meubles et de la vaisselle qui se brisaient au milieu de la bagarre.

Dans l’embarras où il se trouvait, notre surintendant, oubliant ses préjugés et ses injustes préventions, accourut vers nos petites prisons, ouvrit les portes et nous appela dehors : ce que nous pûmes faire sans délai, attendu que, à raison du froid et de l’insuffisance de couvertures, nous couchions d’ordinaire tout habillés. Une fois réunis, ce qui fut l’affaire d’un instant, le surintendant nous ordonna de nous emparer de tous les hommes de police et des soldats, et de mettre sous clef, dans une des remises, toute la force préposée à notre garde. Nous obéîmes, sans savoir alors un mot de l’origine et des causes de la querelle, et sans prévoir quelles seraient les suites de cette aventure extraordinaire. Un seul homme, un sergent, n’avait pas été arrêté : ce fut lui qui fut chargé seul de nous garder pendant le reste de la nuit.

Voilà comment nous gagnâmes les bonnes grâces de notre supérieur ; au point que nous osâmes lui représenter que nos couvertures étaient insuffisantes pendant les nuits froides, et au point qu’il fut de notre avis, fit des représentations au gouvernement et se montra fort mécontent du refus qui suivit sa demande.

Peu d’étrangers échappent à la dysenterie, à