Aller au contenu

Page:Prieur - Notes d'un condamné politique de 1838, 1884.djvu/221

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
226
NOTES D’UN CONDAMNÉ POLITIQUE.

Immédiatement à la suite de mon entrevue avec M. Graham, j’avais retenu mon passage à bord d’un navire qui devait partir le 10 juillet ; ce navire s’appelait Le Montréal. Entre tous les navires en partance pour le Canada, j’avais choisi Le Montréal, à cause de son nom : il me semblait que ce nom du pays devait me porter bonheur.

Je trouvai bien longs les quelques jours que j’eus à passer encore dans la sombre métropole de l’Angleterre en attendant le départ du navire qui devait m’emporter vers les bords du Saint-Laurent, dont les rives semblaient déjà me sourire. De toutes les distractions que j’essayai à me donner, une seule pour ainsi dire m’est restée en mémoire : je veux parler de ma présence à une grande revue militaire, passée par le duc de Wellington, en l’honneur du vice-roi d’Égypte, alors en visite à la cour de Saint-James. Ce n’était pas une revue aussi nombreuse qu’on en voit quelquefois en France et dans d’autres contrées militaires de l’Europe ; mais c’est la plus considérable que j’aie jamais vue, et c’était un spectacle des plus imposants et des plus magnifiques. Je pus être témoin de l’enthousiasme fanatique dont le peuple anglais était animé pour la personne du Duc ; car il n’y avait pas besoin d’ajouter son nom de Wellington : il y avait, comme toujours, plusieurs ducs en Angleterre à cette époque, mais lui c’était Le Duc (The Duke). Les troupes étaient magnifiques, et tous les bourgeois de Londres,