Page:Procès-verbal de la Commission Municipale du Vieux Paris, 1900.djvu/151

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moderne. Elle s'est souvenu, pour le travail du fer, combien les vieux logis encore existants de par la Ville, étaient riches en ferronneries forgées, ornant de leurs dessins élégants, les fenêtres et les escaliers. Elle s'est rappelé, pour celui du bois, avec quel art on le travail- lait aux siècles derniers et combien d'échantillons il en restait, nombreux et variés, dans ces antiques maisons destinées à disparaître, enlevées pour les besoins de l'inéluctable alignement.

Il lui apparut que ces matériaux d'art, étant la pro- priété de la Ville, rien ne serait plus simple et plus intéressant que de les lui conserver en les réinstallant ailleurs.

La formule trouvée pour la réalisation de cette idée, fut celle-ci : Réédifier, par exemple, dans tel ou tel édifice municipal, en cours de construction ou de répa- ration, soit une magistrale rampe d'escalier du xvn" ou du xviii" siècle, soit de beaux appuis de fenêtre ou de fines boiseries sculptées, à réserver des démolitions pouvant intervenir.

Grâce à cette décision préservatrice, de beaux mor- ceaux d'art sont entrés dans les collections de la Ville, parmi lesquels il faut citer de délicates boiseries du plus bel effet, provenant de l'expropriation d'un grand hôtel de la rue de Varenne, démoli pour le passage du bou- levard Raspail.

Il lui sembla, d'autre part, qu'il y aurait tout profit, pour les jeunes apprentis des écoles professionnelles parisiennes du fer et du bois, à avoir constamment sous les yeux, dans leurs écoles, des spécimens bien choisis de ces matériaux artistiques dont les qualités d'élégance et de travail n'ont pas été dépassées de nos jours.

Qu'y avait-il à faire en cette occurrence, sinon demander, à l'Administration municipale, un asile dans les écoles d'apprentissage, pour abriter quel- ques-uns de ces modèles, arrachés par l'expropriation aux bâtisses pour lesquelles ils avaient été créés ?

La municipalité répondit par l'affirmative.

Il est permis de rêver, comme conséquence et dans un temps prochain, la création dans les écoles profes- sionnelles, de musées d'art industriel correspondant à chacun des enseignements donnés et ayant pour base les antiques matériaux artistiques procurés par la Commission du « Vieux Paris ».

La délicate question du classement des monuments parisiens présentant un caractère d'art ou d'histoire devait également l'intéresser. L'extension de la liste fixée par l'Etat fut l'une de ses plus grandes préoccu- pations.

Il est de toute évidence, en effet, que des monu- ments absolument admirables et de premier ordre au point de vue de l'art, ne figurent pas sur la nomencla- ture du ministère des Beaux-arts.

La Commission du « Vieux Paris » pensa qu'un des premiers articles de son programme 'devait être la conservation du plus grand nombre possible de ces monuments épars un peu partout dans la capitale et qui sont comme la couronne de sa gloire et la marque de sa grandeur.

Le classement à titre de monument historique, en

vertu de la loi du 30 mars 1887, étant l'un des plus sûrs garants contre le vandalisme et la déprédation, la Commission poursuivit l'idée de faire rentrer sous cette aile tutélaire et préservatrice, quelques-unes de ces grandes pages d'architecture qui n'ont pu encore y trouver place.

La difficulté, malheureusement, est grande pour obtenir le classement; c'est un contrat pour lequel la loi, ne voulant léser personne, exige le consentement mutuel des parties : le propriétaire et l'Etat.

C'est évidemment à cette difficulté qu'il faut faire remonter la pauvreté de la liste parisienne des monu- ments qui ont bénéficié de cette sage mesure.

Parmi ceux qui n'y figurent pas, la Commission releva l'ancien hôtel de Toulouse dépendant de la Banque de France;

Le Palais Royal ;

L'ancien réfectoire des Cordeliers, actuellement musée Dupuytren ;

L'ancien hôtel de Rohan, aujourd'hui Imprimerie nationale ;

L'Arc de Triomphe de l'Etoile ;

L'hôtel Scipion Sardini, actuellement Boulangerie des hôpitaux ;

L'hôtel Montholon, ancienne maison Sallandrouze ;

La maison de Nicolas Flamel;

La tour de Dagobert;

Les regards des anciennes eaux de Belleville et du Pré Saint-Gervais ;

La place des Victoires ;

La tourelle de la rue Hautefeuille.

L'hôtel de Sens;

L'hôtel de Lauzun ;

La Tour de la rue Bailly, provenant de l'enceinte fortifiée du monastère do Saint-Martin-des-Champs;

L'hôtel Lamoignon;

L'hôtel d'Aumont;

L'église de l'Assomption, etc., etc.

Combien de choses intéressantes il serait possible encore d'ajouter à cette nomenclature !

Quoi qu'il en soit, et grâce aux efforts de la Commis- sion, un commencement de satisfaction lui a été récemment donné et des arrêtés de classement ont été pris concernant l'hôtel Scipion Sardini, le groupe en bas-relief des Chevaux du Soleil, qui surmonte la porte des anciennes écuries de l'hôtel de Rohan, au- jourd'hui Imprimerie nationale, et les anciens regards des eaux de Belleville et du Pré-Saint-Gervais.

De l'ancien hôtel Scipion, il reste une. délicieuse galerie de la Renaissance italienne de la plus belle conservation.

Le groupe des Chevaux du Soleil ou des Chevaux à l'Abreuvoir est un admirable morceau d'art de Le Lorrain. Il est malheusement surmonté de construc- tions hétéroclites qui nuisent à son harmonie et vien- nent tempérer le charme qui se dégage de sa compo- sition.