Page:Procès verbaux des séances de la Société littéraire et scientifique de Castres, Année 1, 1857.djvu/7

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suivant sa force et son inspiration, apporte sa pierre à l’édifice commun.

Je connais cependant, et vous connaissez comme moi, les objections qui s’élèvent, les critiques protectrices qui s’adressent d’avance aux entreprises de la nature de celle que vous voulez former. On dit, et je n’y contredis pas, qu’il n’existe en France qu’un véritable centre scientifique et littéraire, et qu’ailleurs, les amis des lettres ne sauraient sentir que des efforts impuissants, ne sauraient produire que des germes avortés. Nous pouvons cependant répondre humblement, qu’à côté des grands génies qui conçoivent les grandes œuvres, et qui, pour les exécuter, ont besoin des épreuves, des ressources et des inspirations de la grande ville, il faut laisser quelque place aux esprits laborieux et patients, inventifs même quelquefois, qui n’ont ni le pouvoir ni la volonté de s’exiler du sol natal, pour le doter plus tard des fruits de leur exil. Paris sera donc l’astre unique ; les Sociétés comme la vôtre aspireront seulement à devenir les rayons de cet astre dominateur, rayons voilés parfois, qui n’éblouissent pas le regard, mais qui peuvent l’éclairer d’une lueur paisible et modeste.

Voilà le rôle qui vous appartient ; et il est encore assez beau, parce qu’il est utile. Dans la carrière, bornée qui vous semble tracée d’avance, vous trouverez d’ailleurs des exemples qui portent avec eux et leur leçon et leur encouragement. Pendant les vingt dernières années, les Sociétés de province, mieux inspirées et mieux dirigées, renonçant à la muse légère et trop docile du vieux Parnasse, sont entrées résolument dans la voie sérieuse de l’érudition. De patientes recherches ont été faites, les bibliothèques publiques et privées ont été interrogées séparément, les archives des villes et des communes, celles des familles ont été explorées, et, de toutes parts, des œuvres dignes d’estime, des mémoires instructifs, des monographies précieuses sont venus attester ce que renferme de trésors la poussière des temps passés quand elle