Page:Procès verbaux des séances de la Société littéraire et scientifique de Castres, Année 2, 1858.djvu/29

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 29 —

à une statue de même matière, de même origine et de même style, que les ornements du Jubé de Ste-Cécile à Albi. La présence d’une œuvre de ce caractère et de ce mérite à Salles, s’explique par le voisinage du château de Combefa qui appartenait aux seigneurs archevêques d’Albi. En 1784, les habitants de Monestiés obtinrent de Mgr de Bernis, cardinal archevêque, l’autorisation de transporter dans la chapelle de l’hôpital, la sépulture du Christ, magnifique composition, intacte encore aujourd’hui, et digne par ses proportions, aussi bien que par la pureté des formes et la hardiesse de l’exécution, d’une étude sérieuse, et d’une admiration réfléchie. Il n’est pas étonnant que la petite église de Salles ait été dotée à cette époque, ou antérieurement, d’une de ces œuvres que les corporations de sculpteurs, où se cachaient modestement de grands artistes, jetaient à profusion sur leur passage, sans les revendiquer par un nom, sans les marquer d’un signe.

Le mérite de ce fragment est incontestable. Le dessin a cette rectitude et cette pureté qui portent l’empreinte d’une étude approfondie et d’une observation minutieuse. L’expression est saisissante. Ce n’est pas la douleur humaine avec ses mouvements tourmentés qui déforment la nature. C’est une douleur divine. Sous des traits calmes, sous des lignes sans contraction, se dégage avec une vérité frappante, quelque chose qui n’appartient pas à l’homme, et qui révèle, avec un éclat incomparable, le rédempteur sous les traits du crucifié. L’exécution des détails est irréprochable. Le raccourcissement de la face qui indique d’une manière assez évidente les dimensions restreintes du corps tout entier, est un précieux indice pour le classement de cette statue. « Toutes les sculptures du XVme siècle, dit M. le baron Taylor, sont courtes, et cela par opposition aux premières statues mérovingiennes qui étaient très élancées. Les unes ouvraient la marche des arts du moyen-âge ; elles étaient sveltes : celles-ci étaient fortes parce qu’elles allaient le fermer. »