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le wagnérisme en france avant la guerre

d’honneur ; mais il ne semble pas que cette Association, dont le siège était à la même adresse que celui des Concerts Lamoureux, pût jamais parvenir à une action quelconque.

Si Lohengrin succombait sous le bruit de manifestations politiques et soi-disant patriotiques, n’y avait-il pas, dans le monde artistique, quelqu’un ou quelques-uns qui devaient profiter de sa chute ? Une brochure, signée Georges Street, parue au mois de juin, ne permet guère d’en douter.

« M. Saint-Saëns, dit l’auteur de cette plaquette, doit tout à l’Allemagne et à la musique de Wagner. Personne ne parlerait en France de M. Saint-Saëns si Berlin et Weimar n’avaient pas tiré ses œuvres de la poussière où elles retourneront certainement quoi qu’il fasse. C’est M. Saint-Saëns qui, après la guerre, s’en est allé donner des concerts à Bade, se vantant bien haut de reprendre aux Prussiens quelque chose de nos milliards. » Il y a, certes, une dose d’exagération dans ces paroles où perce le parti-pris ; mais ce qui suit, relativement au directeur du Ménestrel, paraît de toute justesse :

« Pourquoi M. Heugel a-t-il entrepris contre Lohengrin une campagne dans le Ménestrel ? Oh ! mon Dieu, tout simplement parce que la partition de Lohengrin est la propriété de MM. Durand et Schœnewerk, et que lorsqu’une partition est éditée ailleurs qu’au Ménestrel, l’œuvre est indigne d’être représentée sur une scène française. M. Francis Magnard ne s’est pas trompé quand il a dit que dans toute cette affaire la question de boutique primait les autres. »