Page:Prod’homme - Richard Wagner et la France, 1921.djvu/69

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
57
la question wagner depuis la guerre

Admettons que, pour les besoins de sa cause — pour stimuler un peu la torpeur viennoise — Wagner ait exagéré les mérites de l’Opéra de Paris, il n’en est pas moins vrai qu’au lendemain de Tannhäuser, on chercherait en vain, dans ces écrits rédigés pour des Allemands, une expression de rancune à l’adresse de Paris ou de son Opéra : bien au contraire !


Continuons à parcourir les Gesammelte Schriften. Voici maintenant Art allemand et politique allemande, la seule brochure où l’on trouve des attaques violentes contre la France et les Français. Datée de 1867, elle vient chronologiquement, avant la première des Maîtres-Chanteurs, quelques mois après la victoire prussienne de Sadowa. Singulièrement prophétique par endroits, elle révèle un état d’esprit assez nouveau chez son auteur, comme d’ailleurs dans le peuple allemand en général. Avant de paraître, elle déplut en Allemagne au point que la Süddeutsche Presse de Munich, qui la publiait en feuilleton, dut l’interrompre par ordre du procureur royal, — et, cependant, Louis II, roi de Bavière, en félicitait Wagner !… Traduit presque immédiatement pour le Guide musical, Art allemand et politique allemande pouvait être lu en France, dès 1868. On n’y fit nulle attention apparemment ; on ne l’a guère lu depuis et pourtant, c’est là, ainsi que le faisait remarquer judicieusement M. Servières, dans son Wagner jugé en France, c’est là seulement que Wagner s’est montré le plus anti-français, le plus injuste envers la France ; infiniment plus que dans Une Capitulation, — qui n’est qu’un vaudeville à peine