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LE COUPLE AU JARDIN

— Bon. Nous reparlerons de ces choses lorsque trente autres années, moins légères, auront passé sur vous. Vous aurez alors reçu quelques tapes et vous nous direz comment vous avez su accepter, oublier et recommencer !

— Eh bien ! je ne désespère pas de vous rendre un jour mes comptes. Les « tapes » comme vous dites, sont prévues. Mais je crois que le bonheur définitif est une mosaïque patiemment construite avec les éclats et les paillettes de nos espoirs brisés.

— Comme on sent bien que vous parlez théoriquement ! Les espoirs brisés vous apparaissent en brillantes paillettes, alors que, dans la réalité, ils ne sont que boue ou cendre grise !

Et, avec une nervosité qu’elle contrôlait à peine, elle se mit à faire le procès de la vie, toujours injuste, inique, basse et absurde.

Nérée écouta patiemment ce réquisitoire et conclut avec sa foi tranquille :

— Quand vous aurez tout dit sur la tristesse de la vie, ses laideurs et sur l’ignominie des hommes, il n’en restera pas moins que nous possédons ce soleil, cette mer, l’ombre des arbres, le parfum des fleurs, les livres, la musique, le cœur des femmes et le rire des petits enfants.

Diane se leva brusquement, tendit la main aux deux femmes et, se tournant vers l’optimiste impénitent :

— Bonsoir, monsieur. Je vous laisse à vos mosaïques !

Lorsque les trois Galliane se retrouvèrent seuls, la mère remarqua :

Mme Horsel était nerveuse, ce soir.