Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/153

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une formule de bienfaisance purement volontaire, qui n’engage pas la conscience ; nous n’avons marché qu’à l’aide du bourreau et de la police, et, sur les choses les plus importantes de l’économie sociale, nous sommes encore aussi sauvages que les premiers qui, fatigués de meurtre, de rapine et de viol, convinrent de respecter mutuellement leurs biens, leurs femmes et leurs vies, et fondèrent ainsi les premières sociétés.

Quand nous parlons aujourd’hui de mutualité, d’institutions mutuellistes, ne semble-t-il pas que nous disions une chose nouvelle ? L’homme du peuple et le bourgeois, l’entrepreneur et le salarié, le financier et le commerçant, le propriétaire et le fermier, le magistrat et le prêtre, l’économiste et le juriste, l’homme d’État et le simple citoyen, ont peine à nous comprendre ; ils ne saisissent pas nos raisonnements ; et pour eux nos paroles, inintelligibles, sont paroles perdues. L’assurance mutuelle est une vieille idée, que l’on admet volontiers, mais comme théorie, non comme acte de justice ; comme mode de transaction libre, non comme obligation de droit telle, que celui qui, spéculant sur l’insolidarité des risques, se fait du péril général un moyen de fortune, le gouvernement qui laisse faire et la société qui approuve, soient coupables. Or, si tel est, à notre époque, l’état de l’opinion sur la plus élémentaire des mutualités, l’assurance mutuelle, à quoi devons-nous nous attendre pour ce qui touche l’appréciation des valeurs, la loyauté dans les marchés, l’échange des services et des produits, les baux à loyer, etc. ? À qui ferez-vous croire que la dissimulation dans l’offre et la demande est une indélicatesse, bien plus, un véritable délit contre la justice, un attentat à la pro-