Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/243

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pas de manifestations électorales, plus ou moins équivoques, de professions de foi publiées dans les journaux ; de conférences plus ou moins suivies données par quelques orateurs, avec la permission de la police ; il ne suffit pas même que quelques praticiens, passant de l’apostolat à l’action, appellent autour d’eux, dans des associations de secours mutuels ou de coopération, quelques centaines de zélateurs. L’œuvre réformatrice pourrait s’éterniser sans produire d’autre résultat que de divertir de temps à autre les conservateurs. Il faut agir politiquement et socialement, faire appel, par tous les moyens légaux, à la force collective, mettre en branle toutes les puissances du pays et de l’État.

Lorsque Louis XVI, après quinze ans d’efforts inutiles, sentant son impuissance, se résolut enfin à triompher des résistances conjurées de la cour et de la ville, de la noblesse, du clergé, de la bourgeoisie, des parlements, des financiers et du peuple lui-même, il convoqua les États-généraux de la nation. La suite a prouvé que ce n’était pas trop de ce branle-bas universel pour faire passer dans la législation et dans les faits : une révolution déjà accomplie dans les esprits.

Depuis 89, la nation française a changé douze ou quinze fois sa constitution ; et chaque fois il a fallu mettre en mouvement la force et l’intelligence du pays.

Des créations bien moindres, relativement insignifiantes, ont nécessité le concours irrésistible du Pouvoir et de l’Opinion. Pour établir la Banque de France, Bonaparte n’eut pas trop de la dictature consulaire, soutenue d’une coalition de financiers.

Le second Empire a-t-il pu fonder le Crédit foncier, ob-