Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/277

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faire un pas en avant, et adoptant les idées de M. de Genoude sur le suffrage universel, proposa une loi qui, élargissant le droit électoral, pourrait être considérée comme un premier essai de suffrage universel et direct. Grand fut le scandale parmi les soi-disant libéraux qui, s’attribuant le monopole du progrès, se virent tout à coup distancés par leurs adversaires, devenus les promoteurs de l’émancipation politique des masses. La proposition des cléricaux fut traitée d’hypocrite, de révolutionnaire ; on ameuta contre elle l’esprit de conservation, plus féroce encore dans la Belgique constitutionnelle que dans la France impériale ; bref, au projet d’accorder à tout citoyen le droit électoral, sans autre condition que l’âge de majorité et le domicile, les libéraux en substituèrent un autre qui soumettait l’exercice du droit de suffrage à certaines conditions d’instruction et de capacité. On devait exiger, disaient-ils, que tout électeur sût au moins lire et écrire, c’est-à-dire qu’il eût reçu l’instruction primaire. La proposition des cléricaux fut donc écartée : ce fut une des causes qui amenèrent leur défaite aux élections du 11 août.

Certes il est à désirer que tout citoyen ait acquis le degré de connaissance, très-modeste, qu’on trouve partout chez les plus humbles maîtres d’école : mais l’objection des libéraux de Belgique, n’en est pas moins contraire à tous les principes, pleine de mauvaise foi à l’égard du parti rival, et de malveillance pour le peuple. En Démocratie, — n’oublions pas que les Belges se posent en démocrates, — le droit électoral est inhérent à la qualité d’homme et de citoyen, comme le droit de propriété, le