Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/407

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

créer une foule d’emplois publics, des sinécures ; — il faudra diminuer la production des céréales afin d’augmenter d’autant celle des avoines et fourrages, c’est-à dire de la viande, puisque la quantité produite, en toute nature, ne suffira pour en donner au demi-quart des habitants ; il faudra reconstituer de grandes propriétés, des domaines somptueux, où le luxe ait de l’espace et s’étende à l’aise ; il faudra, en un mot, réduire la population, attendu qu’il y en aura toujours trop, ainsi qu’il est aisé de s’en convaincre.

Le libre-échange est le grand ressort de cette machine. Par lui, la concurrence anarchique est élevée, dans tous les pays échangistes, à sa plus haute puissance ; le petit commerce, la petite fabrique, sont écrasés ; la petite culture est dans une certaine mesure atteinte ; la classe moyenne anéantie, la plèbe ouvrière domptée ; tout cela d’autant plus sûrement, que le dernier et le plus rude coup partant du dehors semble l’effet du destin et ne laisse aucune place à la plainte ; et que, grâce au prestige de ce mot liberté, si étrangement prostitué, on a rendu les travailleurs eux-mêmes complices de leur propre infortune (V. au chapitre suivant).

Ainsi la fatalité des choses conduit les sociétés européennes à une sorte de pacte tacite qui, s’il n’y est mis ordre par la perspicacité de l’opinion publique et la vigilance des Gouvernements, pourra quelque jour se formuler en ces termes :


1. Une coalition est formée entre les grands propriétaires, grands exploiteurs, entrepreneurs, armateurs et agioteurs de l’Europe et du globe, contre la multitude associée, en garantie