tant à la fougue de ses penchants : la vertu, dans ce sens, indique une série logique.
243. Le procédé par lequel le signe représentatif d’une idée simple devient signe de série logique, se nomme généralisation.
Les anciens classaient les vertus en quatre familles : Prudence, Tempérance, Force, Justice. Ce sont autant de séries logiques, généralisées des qualités simples que doit avoir chacune de nos actions (Cave, Abstine, Sustine, Retribue ; garde-toi, abstiens-toi, souffre, rends), et prises pour séries naturelles[1].
244. J’invoquais tout à l’heure le témoignage de la philologie : il ne sera pas inutile de montrer ici, par un exemple, de quelle manière se sont formés les noms abstraits.
En hébreu, il n’y a pas, à proprement parler, de noms abstraits ; les mots de cette langue qui y correspondent sont tous, ou des substantifs pluriels, ou des adjectifs féminins. Ainsi, la vie se traduit en hébreu par un mot qui signifie littéralement les vivants, ceux qui respirent, chaïim ; vieillesse et virginité par zakenim et betoulim, les vieux et les vierges ; divinité ou Dieu, par élohim, les forts ou les forces ; justice, par tsedeqah, la juste, etc. D’un côté, c’est la collection prise pour désigner la qualité commune à toutes les parties du groupe ; de l’autre, c’est la personnification de cette qualité. Ce dernier procédé paraît avoir été suivi exclusivement par les langues indo-germaniques, dans lesquelles les noms abstraits sont formés généralement de deux radicaux, l’un, qui exprime l’idée particulière cachée sous l’abstraction ; l’autre, qui sert, pour ainsi dire, à réaliser cette idée : virgin-itas, just-itia, benevol-entia, vir-tus, senec-tus, fort-itudo, mansue-tudo, etc.
Or, que cherchons-nous dans une dialectique sérielle ? L’art de composer et de décomposer nos idées. La formation des mots abstraits est le premier pas que le génie de l’homme ait accompli dans cette route : ainsi la théorie sérielle est aussi ancienne que le monde, et nous n’avons qu’à suivre l’exemple que nous a donné notre instinct.
245. La série logique est un genre factice, produit par l’esprit indépendamment de la réalité objective, et antérieurement à l’expérience : de plus, cette série constitue une bonne partie du langage humain.
Il semble, d’après cela, qu’il en doive résulter une confusion inextricable, et que la science pure, l’intelligence des vraies séries
- ↑ La division des devoirs adoptée par les modernes est prise du point de vue objectif : 1. Devoirs envers Dieu ; 2. envers le prochain ; 3. envers soi-même.