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sée et amoindrie ; elle rencontre là quelque chose qui ne la respecte pas, qui ne lui rend pas justice pour justice et ne lui laisse que le choix entre la domination et la servitude. Le moi et le non-moi ne se font pas équilibre. Là est le principe qui fait de l’homme le régisseur de la nature, sinon son esclave et sa victime.

Ceci établi, le problème de l’accord entre la Justice et l’économie se pose en ces termes, je reprends l’exemple cité plus haut de la division du travail :

Étant donnée une société où le travail est divisé, on demande qui subira les inconvénients de cette division.

On conçoit en effet que dans le cercle de la famille, voire même de la tribu, la prérogative du chef, père de famille ou patriarche, soit plus élevée que celle des enfants, apprentis, compagnons, domestiques. Non-seulement la pratique des nations démontre que cela est possible sans injustice ; l’ordre même de la famille, son bonheur, sa sécurité, le réclament.

C’est sur ce type de la hiérarchie familiale que s’est ensuite formée l’organisation des sociétés, dans lesquelles la prérogative personnelle va décroissant, depuis le prince jusqu’à l’esclave.

On demande donc ce que prescrit ici la Justice : si le principe de hiérarchie et d’autorité doit embrasser la société tout entière, à l’instar d’une grande famille, auquel cas les conséquences de la fatalité économique pèseront de plus en plus sur les classes inférieures et de moins en moins sur les supérieures ; ou bien si les familles doivent être considérées comme également respectables, auquel cas la fatalité économique se répartissant, à la manière d’un risque, entre tous les membres de la société, la servitude qu’elle créait se trouve annulée, et devient même un principe d’ordre.

De cette double hypothèse naissent deux systèmes que