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incontestable avantage d’être conçue dans les principes de la science économique, qui n’est autre que la science de l’équilibre des forces et des valeurs ; de plus, elle est irréprochable au point de vue de l’éthique. Il a plu à MM. Joseph Garnier et Gustave de Molinari de voir dans cette théorie une adhésion déguisée aux idées de Malthus, un restreint moral d’une espèce peut-être plus pudique, mais qui en définitive rentrait dans la prévention malthusienne. Je laisse au lecteur le soin d’apprécier cette assimilation.

Dans le milieu créé par l’inégalité traditionnelle, et défendu comme légitime par les malthusiens, l’homme, ainsi que je le démontrerai plus tard, est lascif et incontinent ; comme la bête, dont il partage la condition, il tend à une multiplication illimitée, aveugle. De là le système répressif, déchaîné par la nature, et dont Malthus retient le premier terme, l’onanisme.

Au contraire, dans le régime de Justice appliquée, et conséquemment d’équilibre général, que le but de la Révolution est d’établir, l’homme, chaste par prédilection, ordonné dans son mariage, dans ses amours, dans toute sa vie, n’a plus besoin qu’on le retienne : il est ce qu’il doit être, et la population se trouve, comme lui, en équilibre.

Cette théorie, tout incomplète qu’elle fût, avait frappé Bastiat, qui tâcha de s’en rapprocher dans ses Harmonies économiques, et aurait sans doute rendu justice à l’auteur, s’il n’était de principe entre malthusiens qu’un socialiste ne peut jamais avoir raison.

De nouvelles réflexions m’ont conduit à modifier cette théorie, dont le défaut grave était de reposer sur une base trop exclusivement physiologique, tandis qu’elle doit reposer avant tout sur un principe moral, en présence duquel la physiologie ne joue plus que le second rôle.

L’homme, être intelligent et libre, capable d’enthou-