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Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/390

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Si le pouvoir est irréprochable dans son objet, faut-il accuser son origine, son installation, son organisation ou sa forme ?

D’une part, quant à l’origine et à l’intronisation, il ne paraît pas qu’elles exercent une influence sérieuse sur la stabilité des États. Quel que soit le prince, qu’il vienne de l’élection ou du droit divin, qu’il soit le produit de l’usurpation ou de la conquête, le pays se montre toujours avec lui de bonne composition, s’il fait justice.

Quant à la constitution du pouvoir, elle peut d’autant moins être un principe de ruine, qu’elle est donnée le plus souvent par la constitution physique du pays : sol, climat, race, tempérament, génie, langue, religion, production agricole, industrie, etc.

C’est en vertu de ce principe que l’histoire de chaque peuple pivote sur une institution centrale, symbole, formule de sa constitution native, expression de son génie, sorte de Palladium et de mot de ralliement, qui ne périt qu’avec lui : dans l’Inde, la caste ; en Égypte, le sacerdoce ; chez les Arabes, la tribu ; en Grèce, l’amphictyonie ; dans l’Italie, ancienne et moderne, l’Église et l’empire ; en France, la monarchie ; en Allemagne, la diète ; en Angleterre, le parlement ; en Espagne, les cortès ; aux Pays-Bas, les bourgeois ; en Suède, les paysans ; en Pologne, les nobles, etc.

Nous avons en France un exemple frappant de cette persistance de la forme native de l’État. Après une durée de quatorze siècles, soit, en comptant les empereurs romains, de près de dix-neuf, la royauté est enlevée par la Révolution. Pour créer l’équilibre social, la première pensée est de refaire le gouvernement. Quelle en sera la forme ? La démocratie, s’écrient les révolutionnaires. Mais non : à peine la démocratie a supprimé la royauté et le roi, qu’elle travaille à les reproduire par sa centralisa-