Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/46

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Fatigués de ces disputes, quelques-uns prennent un parti héroïque : c’est de dire qu’il n’y a d’autre religion que la morale, que spiritualisme, théisme, etc., tout cela ne sert de rien, et que ce qui importe est d’être honnête homme.

À la bonne heure : ce discours me plaît, et j’en tire un excellent augure. Mais alors dites ce qu’est la morale, ce qu’est le droit ; comment il s’applique aux relations diverses de la vie ; montrez d’où vient sa corruption ; prouvez surtout à ces gens infatués de leur immortalité que la Justice se suffit à elle-même, et que si la Justice se suffit, la vie présente se suffit aussi et n’a pas besoin d’une prolongation dans l’éternité.

C’est ainsi que par une critique supérieure nous sommes conduits à reconnaître, d’un côté, que hors de l’Église, chrétienne et catholique, il n’y a ni Dieu, ni théologie, ni religion, ni foi : là, comme dans la logique, la morale, les langues, éclate l’unité de l’esprit humain ; — d’autre part, que la société doit être fondée sur la Justice pure, Raison pratique du genre humain, dont l’analyse et l’expérience s’accordent à démontrer l’incompatibilité, dans l’ordre social, avec la conception d’un monde surnaturel, avec la Religion.

D’où cette conclusion décisive :

Que toute l’histoire antérieure de l’humanité, dominée par le principe religieux, forme une période nettement caractérisée, dans laquelle toutes les constitutions politiques et économiques des peuples, leur législation et leur morale, malgré d’innombrables variétés, sont au fond similaires, se résolvant dans la négation des droits de l’homme et du citoyen ; — et