Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/137

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sa législation. Jamais, dit-il, la religion n’eut en lui un ennemi. Il se félicite de s’être marié à Saint-Sulpice, et d’avoir pris l’engagement de faire élever ses enfants dans la religion chrétienne. Il croit que le catholicisme durera encore bien des siècles, et comme M. Cousin il lui ôte son chapeau. On dirait que, n’osant par respect humain adresser au Christ sa prière, il essaie par des salamaleks de le corrompre. Protestant de son estime pour le prêtre, après avoir jeté le sarcasme à Hégel, à la Révolution, au peuple de Février, à la Réforme protestante, à la nouvelle exégèse allemande, il termine par l’éloge des jésuites.

Henri Heine est mort comme il avait vécu, en catin ; sa place est au charnier des Filles repenties : il ferait honte à la Salpétrière.

En regard de cette mort honteuse, mettez celle d’un révolutionnaire.

J’ai bien aimé, disait Danton en quittant la Conciergerie pour aller à la guillotine ; puis aussitôt, ravi au souvenir de ses deux femmes et de ses enfants par l’image plus grande de la patrie, il ajoutait : J’ai servi la révolution, j’ai renversé la royauté, j’ai fondé la république… Il avait répandu son âme, comme son amour : que lui pouvait la guillotine ?

Jésus, au moment décisif, agonise : à Dieu ne plaise que je l’accuse, avec Celse et Porphyre, d’avoir manqué de courage ! Si sa religion est devenue, par la terreur de la mort, le fléau de l’Humanité ; la faute n’en fut pas à lui, qui comprenait autrement la vie et prêchait d’exemple. Mais Jésus est célibataire ; il s’est sevré d’amour, il a tout donné à la secte, il ne s’est fait qu’une génération équivoque, et il ne sait pas même si cette génération, prête à le renier, à fuir, lui survivra ! Il manque de ce courage viril, que la conscience supplée, mais qu’elle ne remplace pas, et il n’a qu’une notion imparfaite de la Justice. Su-