Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/515

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Car il est évident que, si la liberté n’est pas une réalité fonctionnelle, ce qui serait bien autrement grave pour elle que de présenter un caractère antinomique ; si, comme fonction, elle ne se distingue pas et de l’activité, et de l’intelligence, et de la volonté de nous conformer aux lois générales et à la Justice ; si tout acte de l’homme qui ne procède pas de l’une ou de l’autre de ces facultés ou de leur concours doit être attribué à la déraison et à la folie, c’est-à-dire, en dernière analyse, à la fatalité de la nature, il est, dis-je, évident que la liberté, antinomique ou non, se réduit à zéro ; au lieu d’en chercher la démonstration, nous n’aurions plus qu’à expliquer cette apparence de l’entendement.

XXXI

Après l’embarras suscité par le caractère antinomique de la liberté, la seconde difficulté à vaincre résulte de la double notion de Dieu et de l’univers : Dieu, conçu comme substance, cause et intelligence infinie, de laquelle tout découle, par laquelle tout s’ordonne, dont l’action est irrésistible, aux prévisions de laquelle rien n’échappe ; l’univers, conçu comme tout organisé, sérié, solidaire dans toutes ses parties et toutes ses évolutions, complet, parfait en tant que création, comme Dieu, en tant que créateur, est lui-même parfait.

Ici tous les philosophes sont d’accord, théistes, panthéistes et athées, matérialistes ou idéalistes. Soit qu’ils distinguent les deux termes, Dieu et l’univers, soit qu’ils les résolvent en un seul, la nature, ils partent de l’absolu.

Y a-t-il donc, au sein de la substance infinie, sous l’action toute-puissante de Dieu et le regard de sa providence, dans ce système de la nature dont toutes les parties sont liées, y a-t-il place pour la liberté ?