Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/153

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

dans nos lycées ? C’est que les Géorgiques sont un poème essentiellement, exclusivement utilitaire.

Il a fallu, pour ramener le goût de l’agriculture et des mœurs rustiques, idéaliser, jusque dans les moindres détails, les travaux du labourage, de la vigne, de l’élève des bestiaux, de l’apiculture, cette industrie sucrière des anciens. Et c’est à quoi Virgile est parvenu par un art dont ceux-là seuls peuvent juger qui sont en état de lire son ouvrage.

Virgile est si profondément pénétré de la nécessité pour le poëte de s’appuyer sur ce que la vie présente de plus positif, de plus réel, qu’il n’imagine pas pour lui-même, le grand idéaliste, d’autre prix de son dévouement à l’art que la connaissance des secrets de la nature et des lois de l’humanité. Ce qu’il demande aux Muses, c’est la science, et, si la science ne peut lui être donnée, la vie de paysan. « Que les douces Muses, s’écrie-t-il, dont je porte avec un fervent amour les insignes sacrés, me reçoivent et m’enseignent leurs secrets, la marche des corps célestes, la cause des éclipses, des tremblements de terre et du flux de l’Océan !… Et si la faiblesse de ma raison me rend indigne de participer à ces grands mystères, oh ! alors, que je retrouve mes champs, mes rivières, mes forêts avec leurs masses d’ombre !… »

Le secret de Virgile ici lui échappe : pour lui, point de poésie sans un sentiment profond de la réalité ; point d’idéal en dehors de la pratique raisonnée des choses. C’est d’après cette poétique qu’il conçut son Énéide.

Citons seulement quelques épisodes.

XLVII

Rien de plus beau dans l’Iliade, rien de plus touchant, d’une plus complète poésie, que les adieux d’Hector et d’Andromaque. Je voudrais pouvoir, par mon admiration