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Le concubinat, qui rapproche les personnes, mais ne les identifie pas ; qui unit les corps, en laissant le libre arbitre aux cœurs ; le concubinat, sans Justice propre et sans idéal moral, était tout ce que pouvait supporter la nouvelle religion.

De là aussi l’introduction dans le ménage chrétien d’une tierce influence, qui témoigne énergiquement de sa nature concubinaire.

Chez les anciens, nul ne pouvait pénétrer dans la famille : le gynécée était muré ; ni prêtre ni magistrat n’avait à y voir.

Dans le christianisme, c’est tout autre chose : le prêtre confesse la femme ; il est son époux spirituel ; à lui l’âme, la conscience, le cœur ; au mari, géniteur, le corps. Ils ne sont plus unanimes, c’est-à-dire ils ne font pas un esprit dans deux corps séparés ; ils sont deux, au contraire, comme dit la Genèse, dans une seule chair.

Ainsi l’Église, après avoir flétri l’amour et déshonoré, sans le comprendre, le culte de Vénus, sépare l’épouse de l’époux, malgré l’ordre de Dieu. Au lieu d’initier la femme à la Justice par le mari, le père ou le frère, comme le voulait le mariage romain et comme le veut la nature, elle prétend l’instruire elle-même, par le directeur. Comme dans le ménage fouriériste, le mari, amant charnel, emplira le ventre de la femme ; le prêtre, amant spirituel, emplira l’esprit. De sorte que le mariage chrétien pourrait se définir un cocuage mystique : Hoc est magnum sacramentum !

Partout où le catholicisme a conservé sa puissance, le prêtre est maître de la maison. Que d’incestes spirituels et d’adultères ! Que de maris désespérés par cette aliénation de leurs femmes !

Et toute religion fera de même, j’en atteste Platon et le père Enfantin. Dès lors que la société, au lieu de reposer