Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/50

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pratique et agissante ; elle déchoit quand elle se livre à la contemplation. Comment les mêmes philosophes, après l’avoir conçue théoriquement comme l’acte par lequel le moi idéal s’affranchit de la nature et se la subordonne, la définissent-ils en pratique conscience des lois universelles et conformité à ces lois ? Comment, après avoir posé en principe le mouvement, la force, l’action, concluent-ils par le quiétisme ?

Donc, indépendamment des évolutions organiques constatées, et qui toutes relèvent des nécessités de la nature, de la spontanéité des choses, de la constitution intellectuelle et sociale, il y a lieu de croire qu’il existe dans l’humanité un mouvement plus profond, qui embrasse tous les autres et les modifie, celui de la Liberté et de la Justice.

L’humanité physique se meut ; elle va de la naissance à la mort : ce mouvement s’appelle la vie.

L’humanité intelligente se meut ; elle va de l’instinct à la réflexion, de l’intuition à la déduction : ce mouvement est la logique.

L’humanité religieuse, politique, industrielle, artiste, se meut aussi ; elle accomplit des périodes plus ou moins longues, dans un va-et-vient continuel.

Raisonnant par analogie, d’autant mieux que la liberté est l’antagoniste de tout ce qui est fatal, je dis que l’humanité libérale, morale, justicière, doit aussi se mouvoir.

Ainsi, sans me préoccuper davantage des évolutions de la nature et de l’histoire, essentiellement fatales, qui d’ailleurs n’ont rien de progressif et ne rendent aucunement raison des décadences si longues et si fréquemment répétées de la société, je fixe le point de départ de ma théorie dans la Justice, d’où le mouvement devra s’irradier, soit pour le bien, soit pour le mal, sur toutes les fa-