Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/564

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dire enfin, sur cette question terrible, la pensée, la vraie pensée de la Révolution.

Conseillez-moi, Monseigneur, vous à qui l’Évangile a enseigné, pour toutes les circonstances, des paroles de persuasion… Mais à qui parlé-je ? Je crois entendre, du fond de ma pensée, votre réponse : « Sortez, malheureux, de votre aveuglement ; et puisque, devant tant de témoignages, vous ne pouvez nier, ni pour votre parti ni pour vous, la complicité morale, renoncez à ce parti, à ces doctrines, dont le dernier mot est l’assassinat !… »

Et quand je ferais cette édifiante conversion, la raison publique en serait-elle plus éclairée, l’ordre social plus affermi, l’empereur plus à l’abri des bombes et des balles ? Il y aurait en France un apostat, pour ne pas dire un imbécile de plus, et les choses iraient leur train comme devant. Or, il faut que cette situation tragique, cent fois pire que l’état de siége, ait un terme : le Pays et la Révolution, plus que l’empereur, y ont intérêt.

Eh bien ! je préfère à tout mon devoir et la vérité. Je n’ai coopéré ni directement ni indirectement à l’attentat du 14 janvier ; mais, non moins sincère que Félix Pyat, j’avoue la complicité morale. Vous pouvez vous emparer de ma confession, pour en faire ce que de droit.

Maintenant, daignez m’entendre : ce que j’ai à dire servira plus que toutes les lois de répression. On n’en finit pas avec les maladies sociales par des protestations et des exécutions ; il faut avoir le secret des choses : c’est toujours l’histoire du sphinx qui dévore les gens jusqu’à ce qu’on le devine.

I

Depuis plus de dix-neuf siècles, le meurtre des chefs d’État est à l’ordre du jour dans le monde civilisé. Presque tous les empereurs, en Occident et en Orient, pé-