Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/594

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amours-propres, des rivalités, beaucoup d’illogisme et de malentendu : devant la Révolution, rien. On s’est cru séparé par des abîmes, on s’est fait une guerre qui est allée maintes fois jusqu’à la conspiration et au régicide : les événements de 48 et 51 ont fait voir qu’entre les uns et les autres il n’y avait pas un cheveu, et c’est pourquoi l’on se fusionne. Mais comme, dans ce monde qui a cessé de croire au droit divin, on ne sait pas mieux pour cela ce qu’est le droit de la Révolution, et comme c’est ce droit qu’on cherche d’instinct, comme c’est par lui qu’on jure, le ralliement général opéré on recommencera la guerre, et le régicide sortira de nouveau des rangs de l’ordre, à moins, ainsi qu’on le demandait tout à l’heure, que l’ordre ne trouve le moyen d’en finir.

Ce moyen, que le développement même du régicide devait à la fin indiquer, je puis le faire connaître, sans m’en attribuer aucunement la gloire.

Qu’est-ce qui caractérise le régicide, tel que nous le voyons se pratiquer depuis la Révolution ?

Sous les empereurs romains, il avait pour cause la ruine du spirituel, la matérialisation de la société.

Après la victoire de l’Église, la cause du régicide se modifie : ce n’est plus l’absence du spirituel, c’est sa séparation d’avec le temporel.

Depuis la Révolution, qui nie le droit divin, qui par conséquent affirme, comme les sociétés primitives, l’unité et l’identité des deux puissances, le motif ou le prétexte du régicide est l’infidélité du prince au spirituel nouveau, l’offense systématique à la conscience de la Révolution.

Or, ce spirituel est inconnu ; personne n’a expliqué le dogme révolutionnaire : c’est un desideratum que l’empirisme et l’enthousiasme ne sauraient suppléer, et qu’il appartient à la raison publique seule de découvrir.

Je dis donc que, dans une société où le régicide ne