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6. — Sanction dans la philosophie.


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Critique de la philosophie.

S’il est une vérité certaine en philosophie, c’est que la philosophie n’est pas faite. L’ensemble du savoir, tel qu’il se présente aujourd’hui, et malgré les travaux immenses des modernes, ne forme nullement un tout cohérent en soi, un système naturel, comme on l’a dit du système des plantes substitué par Bernard et Laurent de Jussieu à celui de Linnée. Ce n’est rien de plus qu’un agrégat d’observations et d’hypothèses reliées entre elles par des assimilations dialectiques, des analogies, des transitions oratoires, auxquelles s’ajoutent des problèmes inintelligibles, contradictoires dans leurs termes, provisoirement reçus comme articles de foi.

Et non-seulement l’encyclopédie des connaissances humaines n’est pas constituée, on ne découvre même pas, dans ce chaos philosophique, l’instrument ou le principe d’une constitution, puisqu’en dépit des poursuivants de l’absolu nous ne possédons, dans l’état actuel du savoir, qu’une certitude étroitement subjective, et que rien ne nous garantit que ce qui semble vrai à notre raison le soit en effet.

En autres termes : le corps des sciences dites naturelles ou exactes, en ce moment les plus avancées, ne se relie par rien de positif, de réel, de concret, au corps des sciences dites morales ou sociales, présentement les plus en retard. Or, comme la certitude que nous avons des choses n’est autre en dernière analyse que la certitude que nous avons de nous-mêmes, et que la certitude ou la connaissance que nous avons de nous-mêmes est à peu près nulle, il s’ensuit que ce que nous savons le mieux, nous le savons en vertu de ce que nous ne savons pas ; ce dont une mul-