Page:Proudhon - Du Principe fédératif.djvu/103

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

collectivité essentiellement indivise, comment le peuple saisirait-il de plein saut le rapport du citoyen à la société ? Comment, sous son inspiration, les hommes d’État qui le représentent donneraient-ils la vraie formule du gouvernement ? Là où règne dans sa naïveté le suffrage universel, on peut affirmer d’avance que tout se fera dans le sens de l’indivision. Le peuple étant la collectivité qui renferme toute autorité et tout droit, le suffrage universel, pour être sincère dans son expression, devra autant que possible être lui-même indivis, c’est-à-dire que les élections devront se faire par scrutins de liste : il s’est même trouvé en 1848 des unitaires qui demandaient qu’il n’y eût qu’une seule liste pour les quatre-vingt-six départements. De ce scrutin indivis surgit donc une assemblée indivise, délibérant et légiférant comme un seul homme. En cas de division du vote, c’est la majorité qui représente, sans diminution aucune, l’unité nationale. De cette majorité sortira à son tour un Gouvernement indivis qui, tenant ses pouvoirs de la Nation indivisible, est appelé à gouverner et administrer collectivement et indivisément, sans esprit de localité ni intérêt de clocher. C’est ainsi que le système de centralisation, d’impérialisme, de communisme, d’absolutisme, tous ces mots sont synonymes, découle de l’idéalisme populaire ; c’est ainsi que dans le pacte social, conçu à la manière de Rousseau et des Jacobins, le citoyen se démet de sa souveraineté, et que la commune, au-dessus de la commune le département et la province, absorbés dans l’autorité centrale, ne sont plus que des agences sous la direction immédiate du ministère.