Page:Proudhon - Du Principe fédératif.djvu/104

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Les conséquences ne tardent pas à se faire sentir : le citoyen et la commune déchus de toute dignité, les envahissements de l’État se multiplient, et les charges du contribuable croissent en proportion. Ce n’est plus le gouvernement qui est fait pour le peuple, c’est le peuple qui est fait pour le gouvernement. Le Pouvoir envahit tout, s’empare de tout, s’arroge tout, à perpétuité, à toujours, à jamais : Guerre et Marine, Administration, Justice, Police, Instruction publique, créations et réparations publiques ; Banques, Bourses, Crédit, Assurances, Secours, Épargnes, Bienfaisance ; Forêts, Canaux, Rivières ; Cultes, Finances, Douanes, Commerce, Agriculture, Industrie, Transports. Sur le tout un Impôt formidable, qui enlève à la nation le quart de son produit brut ! Le citoyen n’a plus à s’occuper que d’accomplir dans son petit coin sa petite tâche, recevant son petit salaire, élevant sa petite famille, et s’en remettant pour le surplus à la Providence du gouvernement.


Devant cette disposition des esprits, au milieu de puissances hostiles à la Révolution, quelle pouvait être la pensée des fondateurs de 89, amis sincères de la liberté ? N’osant rompre le faisceau de l’État, ils devaient se préoccuper surtout de deux choses : 1o de contenir le Pouvoir, toujours prêt à usurper ; 2o de contenir le Peuple, toujours prêt à se laisser entraîner par ses tribuns et à remplacer les mœurs de la légalité par celles de l’omnipotence.


Jusqu’à présent, en effet, les auteurs de constitutions, Syeyès, Mirabeau, le Sénat de 1814, la Chambre de 1830, l’Assemblée de 1848, ont cru, non sans raison, que le