entrave, ce projet, dis-je, avait son côté plausible, et il y eut un instant où l’on put croire qu’il réussirait. Il fallait pour cela, comme je l’ai dit plus haut, attendre tout du temps et de la pression des circonstances ; s’adresser aux gouvernements qu’inquiétait le progrès des armes françaises, à l’empereur des Français lui-même que fatiguait l’affaire de Rome, et qu’aurait fini par entraîner la Démocratie, prête à sacrifier à la grandeur du nouveau royaume l’intérêt manifeste de l’Empire.
Mais du moment que Garibaldi et Mazzini se séparaient de Victor-Emmanuel, faisaient appel aux nationalités, c’est-à-dire à toutes les factions évincées de l’Europe, déclaraient la guerre aux dynasties, à l’Autriche devenue constitutionnelle, à la Russie émancipatrice de ses paysans, à la France impériale dont l’intervention venait de rendre la liberté à l’Italie ; du moment qu’ils refusaient de compter avec les puissances établies et avec les nécessités du siècle pour se livrer à leur emportement démagogique, la partie était perdue pour eux, et leur projet d’unité, condamné par la Révolution et par l’Économie politique, n’apparaissait plus, au point de vue politique, que comme une insoutenable utopie.
Des résurrections de Lazares, opérées par la vertu du prononcement populaire, en dehors de la prudence la plus commune, voilà donc le fonds et le tréfonds de la politique des modernes démocrates ! Au lieu de pousser les peuples dans la voie des fédérations, qui est celle de toutes les libertés politiques et économiques, on les soûle d’utopies