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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

avec vos règles, votre perfection et votre élégance Les anciens, par respect pour les dieux, craignaient sur toute chose de tourmenter leurs figures ; jusque dans le paroxysme de la douleur, ils observaient les lois de la dignité antique ; le gladiateur devait tomber avec grâce ; la moindre contraction nerveuse et musculaire leur aurait paru une grimace, une offense à l’art. Cela faisait partie de leur esthétique par une raison fort simple : c’était dans leur religion et dans leurs principes. Mais nous, qui n’avons aujourd’hui que faire des dieux, nous qui, depuis l’abolition de l’esclavage, du servage et de la féodalité, ne craignons plus de nous amoindrir enlaissant paraître nos émotions ; nous qui recherchons sur toute chose le mouvement, l’action, la vie, la couleur, la passion, la force,.qui nous cherchons nous-mêmes, et voulons nous contempler aussi bien dans la fièvre de la pensée que dans le calme de la mélancolie, dans la vulgarité de nos travaux que dans l’accomplissement de nos devoirs civiques, nous ne pouvons accepter vos modèles, puisque, mieux nous réussirions à les imiter, plus nous nous rendrions ridicules.

Ces observations étaient irréfutables ; aussi les classiques n’y répondaient-ils pas. Ils alléguaient que l’art est absolu, universel, éternel ; que ses règles, qui sont les lois du beau, de même que les règles de la logique et de la géométrie, sont immuables ; que les anciens les ont d’autant mieux pratiquées qu’ils les ont mieux