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ÉVOLUTION HISTORIQUE

présenter au vif [1] ; il est impossible d’en faire un roman vrai, pas plus que de parler latin ou grec comme les contemporains de Cicéron ou de Démosthènes.

La traduction du premier chant de l’Iliade par M. Littré est un tour de force pour lequel il a fallu beaucoup de talent et de science, un prodige de philologie ; je n’oserais y voir une œuvre littéraire.

L’humanité, en gagnant des siècles, ne peut s’oublier elle-même. Mais ses mœurs changent et ses goûts ; et nos arts, en tant qu’ils nous regardent directement, ne peuvent plus être ce qu’ont été les arts de nos pères. Là est la grande conciliation des époques et le vrai génie des artistes. Aux élèves, par conséquent, toute la

  1. Nous ne manquons ni d’études ni de matériaux historiques. Avons-nous vraiment une histoire ? Nous avons l’histoire providentialiste (BOSSUET, ANCILLON, CANTO ) ; L’histoire soi-disant philosophique (GIBBON, KAY.NAL) ; L’histoire classique (VERTOT) ; L’histoire chauvinique (Victoires et Conquêtes, VAULABKLLE) ; L’histoire apologétique et bavarde (TIHERS : Histoire du Consulat et de L'Empire) ; L’histoire doctrinaire (THIERS : Histoire de la Révolution) ; L’histoire épique (MICHELET) ; L’histoire-roman (LAMARTINE) ; L’histoire jacobinique et déclamatoire (Louis BLANC) ; L’histoire-journal (DuCHEZ) ; Enfin des manuels d’histoire, cours d’histoire, résumés d’histoire : simples cahiers de professeurs destinés à la jeunesse qui se prépare au baccalauréat. Nous n’avons pas d’histoire, parce que nous ne sommes pas devenus nous-mêmes.