Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/171

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la République, selon moi, n’étant autre chose qu’une résiliation de bail entre le Peuple et le Gouvernement. Adversùs hostem œterna auctoritas esto ! dit la loi des Douze Tables. Contre le pouvoir la revendication est imprescriptible, l’usurpation est un non-sens.

Cependant au point de vue de la souveraineté du nombre, du mandat impératif et du suffrage universel qui nous régissent plus ou moins, ces citoyens-là commirent un acte usurpatoire, un véritable attentat contre la foi publique et le droit des gens. De quel droit, eux sans mandat, eux que le Peuple n’avait point élus, eux qui, dans la masse des citoyens, ne formaient qu’une minorité imperceptible, de quel droit, dis-je, se sont-ils rués sur les Tuileries comme une bande de pirates, ont-ils aboli la monarchie, et proclamé la République ?

La République, disions-nous aux élections de 1850, est au-dessus du suffrage universel ! Cet apophthegme a été reproduit depuis à la tribune, avec acclamations, par un homme qui n’est pas suspect cependant d’opinions anarchiques, le général Cavaignac. Si cette proposition est vraie, la moralité de la Révolution de février est vengée : mais que dire de ceux qui, en proclamant la République, n’y virent autre chose que l’exercice même du suffrage universel, une forme nouvelle de Gouvernement ? Le principe gouvernemental admis, c’était au Peuple à prononcer sur la forme : or, qui oserait affirmer que si cette condition eût été remplie, le Peuple français eût voté en faveur de la République ?……

Le 10 décembre 1848, le Peuple, consulté sur le choix de son premier magistrat, nomme Louis Bonaparte, à la majorité de 5 millions et demi de suffrages sur 7 millions et demi de votants. En optant pour ce candidat,