jusqu’à ce jour, dans sa plénitude, à aucun philosophe, et dont l’exposition exigerait à elle seule un volume aussi gros que celui-ci. Je me borne à rappeler que cette idée, qui ne fait qu’exprimer d’une manière concrète la souveraineté positive du genre humain, identique à la souveraineté individuelle, est le principe secret, bien que non avoué, de tous les systèmes de consultation populaire, et revenant à M. Rittinghausen, je lui dis :
Comment avez-vous pu croire qu’une pensée à la fois particulière et générale, collective et individuelle, en un mot synthétique, pouvait s’obtenir par la voie d’un scrutin, c’est-à-dire, précisément, par la formule officielle de la diversité ? Cent mille voix, chantant à l’unisson, vous donneraient à peine le sentiment vague de l’être populaire. Mais cent mille voix individuellement consultées, et répondant chacune d’après l’opinion qui lui est particulière ; cent mille voix qui chantent à part, sur des tons différents, ne peuvent vous faire entendre qu’un épouvantable charivari ; et plus, dans ces conditions, vous multiplierez les voix, plus la confusion augmentera. Tout ce que vous avez à faire alors, pour approcher de la raison collective, qui est l’essence même du peuple, c’est, après avoir recueilli l’opinion motivée de chaque citoyen, d’opérer le dépouillement de toutes les opinions, de comparer les motifs, d’en opérer la réduction, puis d’en dégager, par une induction plus ou moins exacte, la synthèse, c’est-à-dire, la pensée générale, supérieure, qui seule peut être attribuée au peuple. Mais quel temps pour une semblable opération ? Qui se chargera de l’exécuter ? Qui répondra de la fidélité du travail, de la certitude du résultat ? Quel logicien se fera fort de tirer de cette urne du scrutin qui ne contient que des cen-