Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/223

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Je me borne à constater que la pensée était éminemment révolutionnaire, et que c’est surtout parce qu’elle était révolutionnaire qu’elle fut écartée. La corporation des exploiteurs de numéraire trouva que l’intérêt à 9 p. % valait mieux pour elle que l’intérêt à 3, que le privilége était bon pour le privilégié, que la Banque agricole menait droit au socialisme, etc. Qui tient tient, badin qui demande, dit le proverbe. Ceux qui voulaient rogner les ongles à l’usure n’étant pas en majorité dans la Constituante, furent battus, et avec raison. Puisque, dans nos mœurs gouvernementales, la justice est primée par la politique, et la vérité par le scrutin, ce qui a été fait a été bien fait : nous n’avons pas droit de nous plaindre.

Toutefois, il est permis d’y revenir. Un simple changement de majorité peut faire changer la loi : c’est dans cette prévision que je publie ce programme.

L’honorabilité de la réforme hypothécaire, je veux dire de la réduction de l’intérêt des prêts sous seing-privé et sur hypothèque, ainsi mise hors de cause, la question est de savoir, 1o à quel taux sera fixé l’intérêt ; 2o en quel délai le nouveau régime sera, partout, substitué à l’ancien.

Quelque système que l’on adopte, et sur le taux de l’intérêt, et sur les conditions du prêt, et sur la forme du papier, et sur le chiffre des émissions, il est clair qu’une fois engagée dans cette route, la tendance de la société, en ce qui concerne les prêts et les dettes, aura changé ; de rétrograde qu’elle est en ce moment par la difficulté du crédit et l’élévation de l’intérêt, elle sera devenue, par la facilité du prêt et la modération du prix, révolutionnaire. Le plus ou le moins de vivacité qu’on donnera au mouvement ne fera rien à sa nature : que vous partiez de Paris pour Dunker-