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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 1, 1869.djvu/141

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à s’attaquer avec plus d’acharnement. Quant au système d’Ancillon, ce n’est pas autre chose que le principe de l’équilibre européen, en vertu duquel les nations, pour ne se pas faire la guerre, sont obligées de se tenir constamment en armes.

Toutefois, comme si l’instinct philosophique avertissait Kant de la puérilité de ses conceptions, après avoir posé les bases d’une pacification générale, il termine par cette réflexion que messieurs du Congrès de la paix feront bien de méditer :


« La paix perpétuelle est impraticable ; mais elle est indéfiniment approximable. »


Hégel n’éprouve pas le même embarras que Kant. Celui-ci croyait à une raison pratique de l’homme, différente par son principe de la raison pure ou spéculative, et donnant lieu à un ordre de faits, d’idées, de sentiments, que l’entendement seul ne suffit pas à expliquer. De cette raison pratique Kant faisait même une sorte de sanction de la raison pure, en montrant que certaines idées, par exemple celles de Dieu, de l’immortalité de l’âme, de la certitude des objets extérieurs et par suite de nos connaissances, idées que la raison pure laissait, selon lui, indécises, nous étaient garanties comme postulés nécessaires de la raison pratique : ce qui signifie qu’en dernière analyse l’intelligence chez l’homme n’a de certitude que celle qu’elle tire de la conscience. Hegel rejette ce dualisme : il ramène tout a un principe unique, la logique, évoluant en noumènes et phénomènes. Ce qui arrive étant donc, en vertu de cette évolution, ce qui doit arriver, Hegel le proclame juste quel qu’il soit, et sans s’inquiéter des protestations subjectives de la conscience. Pour lui le droit est un mot : comme la vérité est ce qui est, la justice est aussi