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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 1, 1869.djvu/167

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posée par le vagissement des masses, elle n’a été relevée par personne, et n’a subi la prélibation d’aucun écrivain.

Il est temps de clore la première partie de celle discussion qu’il n’a pas dépendu de moi d’abréger.

L’opinion antique et traditionnelle sur la guerre, en autres termes, la croyance à un droit réel de la force, est-elle fondée, ou bien, comme le soutient l’école, implique-t-elle contradiction ? Telle est la question que nous avons à résoudre.

Car il est évident que si la religion de la guerre, —j’appelle ici religion toute croyance non rationnellement démontrée, — n’est fondée que sur une illusion de la conscience, si ce n’est qu’un grossier fétichisme, il suffira l’avoir établi, une fois pour toutes, que la force n’a ni ne peut avoir aucun rapport avec le droit, que loin de le créer elle le détruit ; il suffira, dis-je, d’avoir établi cette proposition pour déshonorer la guerre à jamais, et le débat, à peine engagé, finit à l’instant. La guerre ne subsiste que sur sa bonne renommée ; détruisez cette renommée, et vous avez la paix perpétuelle.

La question est d’autant plus intéressante qu’on ne sait vraiment pas de quel côté il y a le plus de chances d’erreur. Se peut-il que tant et de si savants hommes se soient si lourdement, si obstinément trompés ? Se peut-il, d’autre part, que la raison des peuples ait été capable d’une aussi longue et d’une aussi profonde aberration ? Se peut-il, lorsque tant de superstitions ont disparu, englouties les unes par les autres, ou consumées par l’analyse philosophique, que nous soyons, sans nous en douter et sans pouvoir l’empêcher, victimes depuis tant de siècles de la plus stupide de toutes et de la plus exécrable ? Qui aura définitivement raison, cette fois, de la raison instinctive des masses, ou de la raison réfléchie des jurisconsultes ?