Le droit des gens a donc pour objet de déterminer, en général, et sauf la décision ultérieure de la guerre, quand, comment et à quelles conditions il peut y avoir lieu de procéder à la fusion ou incorporation, dans un état plus grand, d’un ou plusieurs autres états plus petits ; fusion qui n’est évidemment pour ceux-ci, et quelquefois pour celui-là, qu’un suicide ; et réciproquement quand, comment et à quelles conditions il peut y avoir lieu de procéder à l’opération inverse, c’est-à-dire à un démembrement.
De ce principe se déduisent des questions fort graves, jusqu’à présent fort peu étudiées, et qui ne figurent seulement pas dans les traités relatifs au droit des gens, mais qui n’en sont pas moins toutes étrangères au droit civil. On a écrit des volumes sur les ambassadeurs, qui ne sont après tout que des fondés de pouvoir constitués d’après les principes du droit civil ; on ne trouverait pas une ligne de saine jurisprudence sur les questions suivantes :
« Quelle peut être la grandeur normale d’un État ?
» Jusqu’à quel point la limitation de l’État est-elle donnée par la géographie, la race, la langue, la religion, la tradition, le degré de civilisation, etc. ?
» Les États peuvent-ils, doivent-ils être égaux entre eux, ou sont-ils condamnés, par la raison des choses, à l’inégalité ?
» Le fusionnement des nationalités peut-il, doit-il aller jusqu’à l’absorption du genre humain, de manière à former une monarchie universelle ?
» Ne serait-il pas plus vrai de supposer que l’unité politique du genre humain consiste, soit dans une hiérarchie d’États, soit dans une confédération ? Dans le premier cas, quel sera le rapport hiérarchique des États ? Dans le second, le principe fédératif ne conduit-il pas, par voie d’analogie, à la résolution des grands États en provinces fédérées ?