Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/27

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Vattel avec un sentiment non équivoque de satisfaction, « depuis lors l’usage a changé… Les stratagèmes font la gloire des grands capitaines. »

Il dit encore, sans songer que les faits qu’il cite démentent sa théorie :


« On a vu des peuples, et les Romains eux-mêmes pendant longtemps, faire profession de mépriser à la guerre toute espèce de surprise, de ruse, de stratagème ; d’autres, tels que les anciens Gaulois, qui allaient jusqu’à marquer le temps et le lieu où ils se proposaient de livrer bataille. Il y avait plus de générosité que de sagesse dans une pareille conduite. »


Il cite également, d’après Tite-Live, livre XLII. c. 47, l’exemple des sénateurs qui blâmaient la conduite peu franche tenue dans la guerre contre Persée.

Il résulte de ces passages, qui n’ont jamais été relevés ni contredits, que ni Grotius, ni Vattel, ni aucun de leurs successeurs, n’ont connu la vraie nature, le but et l’essence de la guerre ; qu’ils n’en ont pas compris les lois, et qu’il est juste de leur imputer la plus grande partie du mal qui l’a accompagnée depuis deux siècles. Comment accuser les militaires, quand les docteurs enseignent une pareille morale ?

A Lonato, en 1796, le général Bonaparte, accompagné de son état-major et suivi seulement de 1,200 hommes, tomba au milieu de 4,000 Autrichiens qui le sommèrent de se rendre. On sait comment Bonaparte se tira de ce mauvais pas. Il fit débander les yeux au parlementaire, lui dit qu’il était le général en chef, que les Autrichiens étaient eux-mêmes cernés par l’armée française, et qu’il leur accordait trois minutes pour se rendre. La bonhomie